Parler de maladie avec ses enfants
Je ne suis pas psychologue mais j’essaie de suivre mon intuition. Je n’ai pas toujours le tact de dire les choses comme il faut, mais on me reconnaît pour ma franchise. C’est ainsi que je gère mes relations avec les autres et aussi avec mes enfants. Et comme ils sont touchés de près par ce que je vis, il faut bien aborder le problème avec eux.
Comment parler de maladie avec ses enfants?
Je ne sais pas s’il existe une recette. Je pense que tout parent concerné par la maladie doit trouver les mots pour affronter le problème avec ses enfants. Je suis de ceux qui croient qu’on ne doit pas mentir aux enfants. On peut adoucir un peu les angles mais cacher la vérité, non.
Je regrette que mes enfants aient été présents lorsque mon neurologue m’a annoncé que la tumeur avait progressé. J’en ai été sonnée, mon Amoureux aussi, et les enfants, chacun à leur façon, ont mal réagi. Mon Grand en prenant directement le chemin de la non-souffrance qu’il a trouvé depuis longtemps, du temps de ma séparation avec son père : la lune, la rêverie. Lieu d’où il est extrêmement difficile de l’en faire sortir. Pinpin, lui, s’est immédiatement agité, requerrant toute attention des adultes présents. Sa façon à lui d’être rassuré.
Je regrette donc ce moment raté où je n’ai pas contrôlé l’arrivée de l’information.
Mais maintenant, la poussière retombe et j’ai eu l’occasion de parler de ce qui m’arrive avec les garçons.
Avec Mon Grand, j’aborde les choses doucement. J’essaie. C’est lui qui a saisi le mieux la gravité de ce qui se passait. C’est lui qui l’intériorise le plus. J’aimerais pouvoir lui dire que les choses vont bien se passer. Mais je ne veux pas lui mentir. Alors je lui explique les risques, les chances de m’en sortir. Je mets l’accent sur le positif sans occulter le reste.
L’autre jour, alors que j’étais seule avec Mon Grand, je lui ai expliqué qu’il était possible que je fasse, un jour ou l’autre, une crise d’épilepsie. Je lui ai dit en quoi cela consistait, lui rappelant d’ailleurs qu’il en avait déjà vu une à son école, il y a plusieurs années. Je lui ai dit de ne pas paniquer, de ne pas avoir peur de moi. Que la seule chose à faire, si un jour il était seul et témoin de cela (en moi-même, je prie pour que JAMAIS cela ne se produise) était de voir à ce que je ne fasse pas mal, à éloigner les meubles et, au besoin, d’insérer un crayon ou un manche de cuillère de bois entre mes dents. Je n’aime pas aborder cela. Je n’en ai plus parlé ensuite. Mais penser que je pourrais faire une telle crise sans que mon fils ne sache ce qui se passe, qu’il ait peur, c’est pire que d’en parler un peu avec lui.
Pour Pinpin, c’est différent. Je lui dis que j’ai un bobo dans la tête. Que ce bobo est grave et que je vais devoir être soignée. Que les traitements vont me rendre faible et que j’ai besoin de mon énergie pour guérir. Je mets surtout l’accent sur cela avec lui : mon énergie. Car ce que je lui demande, c’est d’écouter nos consignes et de collaborer, à sa façon, à nous rendre la vie plus facile à son père et moi.
Et les enfants me posent de temps à autre une question. Ils ont vu les clichés de la résonance, ils peuvent se représenter où est le mal. Ça concrétise peut-être les choses.
Et puis l’autre jour, en voiture rue Saint-Jean, j’ai aperçu une jeune fille la tête rasée de frais. Presque blanche. Une belle fille qui semblait parfaitement en santé. Et j’ai dit à mes garçons que j’aurais bientôt la tête rasée comme elle. Mon Grand, cet amoureux du Kung-Fu, m’a alors dit : « Tu vas pouvoir être un moine de Shaolin! »