Brûler des livres?

Oui. Quelle question, en effet?

Pourquoi brûler des livres? Pour se réchauffer du froid. Simplement. Parce qu'il s'agit d'un combustible. Le papier brûle bien. Brûlons les livres! C'est la guerre. C'est l'hiver. Et que reste-t-il d'espoir, en réalité, dans ce monde brutal, que les derniers moments de chaleur qui se comptent sur les rayons d'une bibliothèque...

La pièce Les Combustibles est adaptée du roman d'Amélie Nothomb et met en scène, dans un monde fictif, trois personnages: un professeur de littérature, son assistant et une étudiante, l'amoureuse de ce dernier.

La guerre fait rage. La nation (laquelle? nous sommes en pleine fiction) est attaquée par les Barbares. Quand on sait que le terme "Barbare" en grec, vient du son "barbarbar" que les Grecs avaient l'impression d'entendre lorsqu'on parlait autre chose que le grec, on peut extrapoler que ces "Barbares" sont ceux qui ne partagent pas la même langue, la même culture (littérature?) que les gens qui subissent le siège. On attaquera même l'université...

Dans un décor qui évoque la désolation et où s'empilent les livres, on assiste à une grande discussion, une réflexion sur la littérature. Son rôle, ce qu'il convient de sauver... Car quel sera le livre sauvé, le dernier à être brûlé? Le grand classique ou, et c'est là que réside une partie du questionnement, ce livre sans valeur littéraire, mais qui a su plaire? Qui a su émouvoir?

Le professeur qui a tant dit de mal de ce livre s'accrochera en fin de compte à lui, de même que la jeune étudiante, qui l'a aussi aimé. Mais pas l'assistant. Idéaliste. Qui croit que la littérature doit être plus haute, plus digne que la simple réalité.

Que doit être la littérature? Une copie émouvante du réel? Ou amener l'esprit humain à se dépasser? L'auteur doit-il se mettre au même niveau que son lecteur ou l'amener à contempler la réalité à un degré plus élevé?

Mais plus encore: à quoi sert-il d'écrire? Car depuis des siècles, des millénaires, de grands esprits ont écrit tant de chefs-d'oeuvre et la guerre existe encore... Grande question. Et peu d'espoir dans les mots d'Amélie Nothomb. Mais une belle pièce. Qui fait réfléchir ceux que ces questions intéressent.

Vous comprendrez que j'ai passé une belle soirée.

Avis aux intéressés, la pièce prend fin le 2 décembre.

Les Combustibles présentée au théâtre du Trident, à Québec. Un texte d'Amélie Nothomb, une mise en scène de Patrick Saucier.

Comments

[Edelweiss]

Merci pour ce billet. Quelle dialoguiste que cette Amélie Nothomb. Vraiment impressionnante.

[L'ethnologue]

Merveilleux si tu as passé une belle soirée! Pour ma part, je tente d'écrire tout en étant aussi inspirée que toi (aie, je ne peux me permettre un 8 ans de syndrome de la page blanche... le doctorat va me semble in-ter-mi-na-ble!

[Cepheides]

Je suis contente que tu aies passé une bonne soirée.